Cameroon Telecommunications (Camtel), concessionnaire unique du réseau national de fibre optique, n’exploite que 16 % des capacités de ses quatre câbles sous-marins. Une sous-consommation pointée par la Chambre des comptes de la Cour suprême dans un rapport publié en juin 2024, couvrant la gestion de l’opérateur depuis 2015. Cette situation intervient dans un contexte où la qualité des télécommunications est régulièrement critiquée par les consommateurs, les autres opérateurs et le régulateur du secteur.
Dans le détail, Camtel n’utilise que 6 % du South Atlantic Inter Link (SAIL), 57 % du West African Submarine Cable (WACS), 29 % du South Atlantic Telecommunications Cable n°3/South Africa Far East (SAT-3), et 92 % du Nigeria Cameroon Submarine Cable Systems (NCSCS).
Pour expliquer cette sous-utilisation, la direction générale de Camtel évoque d’abord le faible taux de pénétration d’internet dans la sous-région, alors que les projections initiales misaient sur une croissance rapide de la demande en bande passante. À cela s’ajoute le fait que 83 % du trafic internet africain est orienté vers l’Europe, ce qui réduit l’intérêt du câble SAIL, et explique en partie son très faible taux d’exploitation.
L’entreprise incrimine également les coûts de transit et de terminaison du trafic au Cameroun, jugés éloignés des standards mondiaux. « Ces prix ont une incidence directe sur le prix de détail des communications électroniques et peuvent effectivement ralentir le marché », justifie la société publique.
La Chambre des comptes, pour sa part, recommande une optimisation de la facturation annuelle sur la base des capacités réellement exploitées. Elle estime, par exemple, que les recettes pourraient atteindre 2,1 milliards de FCFA pour le WACS, 9,3 milliards pour le SAT-3 et 2,2 milliards pour le NCSCS, sur la base des projections faites en 2014.
L’atterrissement de ces câbles sur les côtes camerounaises s’inscrit dans le projet National Broadband Network – NBN I, lancé en 2014. Mobilisant près de 100 milliards de FCFA, ce projet a été financé à 85 % par Exim-Bank of China et à 15 % par l’État camerounais via le Fonds spécial des télécommunications.
Dix ans après, la sous-utilisation persistante des câbles sous-marins interroge sur la pertinence du modèle économique retenu, et sur la capacité du Cameroun à transformer ses infrastructures numériques en véritable levier de compétitivité.
Ludovic Amara
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