Le Liberia compte sur les minéraux critiques pour renforcer un secteur minier dominé par le fer

Publié le 06/11/2025

Le secteur minier est le principal pilier de l’économie libérienne, avec pour moteur historique le minerai de fer. Comptant aussi l’or et les diamants parmi ses produits phares, le pays cherche désormais à valoriser ses minéraux critiques.

La semaine dernière, Matenokay Tingban a été nommé ministre des Mines et de l’Énergie du Liberia, en remplacement de Wilmot J. M. Paye, en poste depuis 2024. Cette décision s’inscrit selon des informations rapportées par Reuters, dans le cadre des mesures engagées par le président Joseph Boakai pour renforcer la gouvernance et l’efficacité de l’exécutif. Elle survient par ailleurs à un moment où Monrovia cherche à mieux valoriser son potentiel en minéraux critiques, dans un secteur minier encore dominé par le minerai de fer.

Une ambition déjà affirmée

Selon la Liberia National Investment Commission, le minerai de fer est le moteur sur secteur minier national, générant des revenus représentant « près de la moitié des recettes du pays avant 1990 » . Si cette dépendance s’est quelque peu réduite ces dernières années, principalement grâce à la production d’or, elle demeure. Un rapport de la Liberia Extractive Industries Transparency Initiative (LEITI) montre ainsi que les deux produits ont dominé les exportations minières du pays de juillet 2021 à fin 2022.

Source: LEITI 2021/2022

C’est dans ce contexte que Monrovia a multiplié les annonces ces derniers mois, dans l’optique de positionner les minerais critiques présents dans son sous-sol. Dans une interview accordée à Energy Capital & Power en février dernier, le désormais ex-ministre J.M. Paye présentait ainsi les minéraux critiques comme le « nouvel enjeu du secteur minier libérien».

« Nous avons récemment mené une étude du potentiel minier qui a permis d’établir un bilan plus précis des réserves réelles du pays. Cette étude a identifié plus d’une douzaine de minéraux critiques, confirmant la présence de lithium, de cobalt, de cuivre et de nickel. Forts de ces données scientifiques, nous nous adressons aux investisseurs internationaux intéressés par l’exploitation de ces ressources », avait-il déclaré.

Cette sortie faisait écho à une autre déclaration du président Boakai, rapportée plus tôt en janvier par Bloomberg. Le dirigeant avait alors indiqué que son pays s’attend à attirer 3 milliards USD d’investissements, suite à la découverte de minéraux critiques dans le pays. Le ton mis sur ces ressources s’est de nouveau confirmé lors de la rencontre entre le secrétaire d’État américain Marco Rubio et la ministre libérienne des Affaires étrangères Sara Nyanti, à Washington en octobre.

Selon le compte rendu fait par la Maison-Blanche, les deux responsables ont notamment abordé les possibilités d’accroître la participation américaine dans les minéraux critiques libériens.

Un marché à 770 milliards USD d’ici 2040 

Pour l’heure, la feuille de route du nouveau ministre des Mines reste inconnue. On ignore si le virage axé sur les minéraux critiques est au cœur de ses priorités, mais en cas de confirmation, cette ambition s’inscrirait dans un contexte plutôt favorable, marqué par les perspectives d’une croissance de la demande pour plusieurs de ces métaux, avec la transition énergétique. Selon l’AIE, la valeur du marché des minéraux critiques pourrait atteindre 770 milliards USD d’ici 2040.

« La valeur marchande combinée des principaux minéraux de la transition énergétique – cuivre, lithium, nickel, cobalt, graphite et terres rares – [va, Ndlr.] plus que doubler pour atteindre 770 milliards de dollars d'ici 2040 dans le scénario NZE. À environ 325 milliards de dollars, la valeur marchande agrégée actuelle des principaux minéraux de la transition énergétique est globalement comparable à celle du minerai de fer », expliquait l’institution dans un rapport publié en 2024.

Attirer des investisseurs et stimuler le développement de nouveaux projets structurants sur ce segment minier permettrait au pays ouest-africain de tirer parti de ce marché en plein essor. Mais malgré la volonté affichée par les dirigeants, le chemin vers ces objectifs s'annonce encore long. Aucune estimation précise des réserves de minéraux critiques établies par l’étude évoquée par M. Paye n’a été publiée à ce stade. Un facteur qui peut pourtant peser dans la prise de décision des investisseurs, selon Mark Cutifani, ancien président de la société minière Vale Base Metals.

« Je demanderais, et c’est un appel à tous les pays d’Afrique, si vous voulez des investissements, ouvrez le code source de vos données d’enquête géologique, permettez-leur d’être transparentes, exigez une valeur pour l’accès à vos ressources, et faites une conversation ouverte », a-t-il exhorté lors du London Indaba en juillet dernier.

Aurel Sèdjro Houenou

Edité par : Feriol Bewa

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