Suite a? l’annonce dans la presse le jeudi 14 novembre de l’intention de la Direction Ge?ne?rale des Impo?ts d’introduire une taxe de 0,5 % sur le montant des transactions mobile money (au-dela? de 150 000 Ar), les trois ope?rateurs de mobile money actifs — MVola, Orange Money et Airtel Money — de?noncent fermement cette mesure. Cette taxe constituera un fardeau pour les 23 millions de Malagasy qui utilisent nos services et met en pe?ril l’e?conomie nationale ainsi que l’avenir de l’inclusion financie?re.
Une taxe sur la vie quotidienne
En augmentant significativement le cou?t des services de mobile money, cette mesure pe?nalisera d’abord les utilisateurs finaux. Pour les me?nages, cela repre?sentera une hausse des frais pouvant aller de x2 a? x5 pour les transferts d’argent et de x2 a? x10 pour les paiements commerc?ants. Ces charges supple?mentaires, couple?es a? un risque accru d’inflation, viendront directement affecter le pouvoir d’achat des foyers les plus vulne?rables.
Par ailleurs, cette mesure affectera e?galement directement les 164 000 agents de distribution (Cash Points). La re?duction de l’utilisation des services mobile money limitera leurs revenus, menac?ant ainsi la stabilite? e?conomique de toutes ces familles (ce qui repre?sente environ 1 million d’individus).
Le retour au cash ? Des conse?quences graves pour l’e?conomie et la socie?te?
Les effets de cette taxe iront bien au-dela? des consommateurs. Cette taxe, en favorisant le retour au cash :
- Freinera la digitalisation de l’e?conomie malagasy en de?courageant l’utilisation des services de mobile money, entrai?nant un recul e?quivalent a? une de?cennie de progre?s.
- Accentuera l’e?conomie informelle, re?duisant la trac?abilite? des transactions et compliquant la collecte de recettes fiscales pour l’E?tat.
- Accroi?tra les risques se?curitaires, avec une manipulation accrue de l’argent liquide.
- Re?duira les entre?es de devises, pourtant essentielles a? l’e?quilibre macroe?conomique du pays.
- De?couragera les investissements locaux et internationaux, envoyant un signal ne?gatif aux entrepreneurs, petites et moyennes entreprises, investisseurs.
- Va a? l’encontre des efforts d’inclusion financie?re promus par la Banky Foiben’i Madagasikara, ainsi que des initiatives de digitalisation de l’e?conomie soutenues par l’E?tat lui-me?me. Soyons tous cohe?rents.
Un leurre pour les finances publiques
Loin d’apporter les recettes fiscales attendues, cette mesure s’ave?re contre-productive. A? l’instar des autres pays en Afrique qui ont expe?rimente? ce projet de taxe (Tanzanie, Ghana, Cameroun, Re?publique Centrafricaine notamment), une telle taxe engendrera a? Madagascar une baisse imme?diate et durable sur le nombre d’utilisateurs actifs du mobile money (-30%) ainsi que sur la valeur de transactions (avec une baisse a? 6 mois estime?e a? -60%). Ainsi, les recettes obtenues suite a? la mise en place de cette taxe se re?ve?leront bien infe?rieures aux pre?visions, ne de?passant pas les 50 milliards Ar annuel (et donc bien loin des 143 milliards Ar).
Dans le me?me temps, le manque a? gagner fiscal direct occasionne? par la baisse d’activite? des E?tablissements de Monnaie E?lectronique ainsi que par le retard accumule? dans la digitalisation et la formalisation des paiements commerc?ants sera supe?rieur a? ce montant (fourchette de 60 a? 100 milliards Ar de manque a? gagner), entrai?nant me?caniquement une perte nette fiscale pour l’E?tat. L’effet de cette mesure sera donc contraire a? celui escompte?.
Il existe pourtant une alternative ...
Nous comprenons qu’il est essentiel de trouver des solutions pour augmenter les recettes fiscales, mais une taxe sur les transactions mobile money est une fausse solution. La ve?ritable voie consiste a? soutenir le secteur du mobile money pour acce?le?rer son adoption a? grande e?chelle.
En effet, le de?veloppement libre et sans entrave du mobile money en 2025 devrait ge?ne?rer d’office plus de 50 milliards Ar de recettes fiscales additionnelles, en taxation directe des e?tablissements et en imposition ordinaire de l’activite? des commerc?ants nouvellement formalise?s. Par un soutien actif au secteur, par le passage sous re?gime obligatoire de la digitalisation des paiements des diffe?rents services de l’E?tat, la digitalisation pourra e?tre acce?le?re?e tre?s fortement. Cette digitalisation contribuera a? la formalisation de l’e?conomie et ge?ne?rera des recettes fiscales accrues, de l’ordre de 100 milliards Ar dans l’hypothe?se d’une acce?le?ration du volume total de transaction et d’un doublement de la valeur des paiements commerc?ants porte?s par l’informel.
Nous continuerons a? nous mobiliser pour de?fendre les consommateurs
Sur la forme, ce projet de taxation surprend e?galement par son absence totale de concertation avec les acteurs concerne?s, alors qu’il menace de bouleverser un secteur vital pour des millions de Malagasy. Cette absence de dialogue est en elle-me?me un signal pre?occupant.
En tant qu’acteurs majeurs de l’inclusion financie?re et du de?veloppement e?conomique a? Madagascar, nous appelons la Direction Ge?ne?rale des Impo?ts a? reconside?rer cette mesure et a? privile?gier un dialogue constructif avec l’ensemble des parties prenantes pour ba?tir une fiscalite? e?quitable et durable. Les ope?rateurs de mobile money sont et resteront mobilise?s pour de?fendre les inte?re?ts des millions de Malagasy qui font chaque jour confiance a? nos services.