
Après plusieurs mois d’embargo destiné à enrayer l’effondrement des prix du cobalt, la République démocratique du Congo a engagé une nouvelle phase de gestion de ses exportations. La nouvelle sortie du ministre des Finances sur la reprise des flux intervient alors que le pays teste encore, dans les faits, un système de quotas suivi de près par les industriels et les marchés.
La RDC a « repris » ses exportations de cobalt, a déclaré le ministre des Finances, Doudou Fwamba (photo), cité mardi 23 décembre par plusieurs médias internationaux. Cette prise de parole marque une reconnaissance politique de la fin de l’embargo instauré en février 2025, après plusieurs mois de blocage total des expéditions de ce métal stratégique.
Selon le ministre, la suspension décidée en début d’année visait à défendre la souveraineté nationale sur les ressources minières et à enrayer la chute des prix provoquée par un excédent d’offre sur le marché mondial. Il a également mis en avant la remontée des cours observée ces derniers mois pour justifier la stratégie adoptée par les autorités congolaises, sous l’égide de l’Autorité de régulation et de contrôle des marchés des substances minérales stratégiques (Arecoms).
Premiers signaux de reprise
Si le ministre n’a pas apporté de précisions sur les conditions, l’état d’avancement ou les modalités concrètes de la reprise qu’il annonce, sa déclaration intervient dans un contexte où les premières opérations liées au nouveau cadre d’exportation commencent à se mettre en place.
Le lundi 22 décembre, Reuters rapportait en effet que les autorités congolaises avaient entamé des prélèvements d’échantillons en vue des premières expéditions de cobalt sous le nouveau régime de quotas, notamment pour le compte du groupe chinois CMOC, l’un des principaux producteurs mondiaux. Ces prélèvements doivent permettre de valider la conformité des cargaisons avant toute autorisation de chargement.
Selon les sources citées par l’agence, les analyses nécessaires à cette étape prennent plusieurs jours et les premières expéditions devraient porter sur de « petits volumes ». Un responsable de Tenke Fungurume Mining, filiale de CMOC, a confirmé que cette phase d’échantillonnage avait bien débuté, tout en précisant que les premières cargaisons ne devraient pas quitter le pays avant le mois de janvier.
Enjeux, interrogations et perspectives
Ces signaux interviennent alors que plusieurs incertitudes entourent encore la mise en œuvre du nouveau régime de quotas d’exportation instauré par la RDC en octobre dernier, après la levée de l’embargo. Comme l’indiquaient de précédentes analyses de l’Agence Ecofin, les exportations de cobalt auraient dû reprendre dès le 16 octobre, mais elles sont restées bloquées en raison de l’absence de texte codifiant la nouvelle procédure. Ce décalage a progressivement déplacé les interrogations vers des enjeux plus opérationnels et juridiques.
Plusieurs entreprises minières ont ainsi indiqué ne pas être en mesure d’utiliser l’intégralité des volumes qui leur avaient été attribués pour 2025, faisant émerger la question du traitement des quotas non utilisés. Le cadre réglementaire prévoit en principe que ces quotas ne soient ni transférables ni reportables, en dehors d’une tolérance exceptionnelle limitée à la fin de l’exercice. La publication, début décembre, d’une note circulaire interministérielle Mines?Finances a permis de lever une partie du blocage réglementaire et d’enclencher les premières opérations sous le nouveau dispositif, à travers une phase de tests portant sur des volumes limités.
Pour la RDC, premier producteur mondial de cobalt, l’enjeu consiste désormais à démontrer sa capacité à appliquer durablement ce nouveau cadre, tout en sécurisant ses recettes fiscales et en préservant l’attractivité de son secteur minier. Pour les entreprises, il s’agit de s’adapter à un dispositif dont les effets sur les volumes exportés et sur les chaînes d’approvisionnement mondiales restent encore à apprécier. Les prochaines semaines permettront surtout d’observer si la dynamique en cours se traduit par une montée en charge plus fluide des exportations, ou si les contraintes administratives continuent de peser sur la relance effective des flux de cobalt congolais.
Louis-Nino Kansoun
Edité par Sèna D. B. de Sodji
Lire aussi :
16/12/2025 - RDC : les quotas d’exportation du cobalt pour 2025 toujours non définis
09/12/2025 - RDC : la filière cobalt en quête de précisions face aux nouvelles règles d’exportation
