TotalEnergies accusée de complicité de crimes de guerre au Mozambique

Publié le 18/11/2025

L’ONG ECCHR accuse TotalEnergies d’avoir financé une unité militaire impliquée dans des tortures et exécutions près du site Mozambique LNG en 2021.

TotalEnergies est visée en France par une plainte pour complicité de crimes de guerre liée à son projet Mozambique LNG. L’ONG European center for constitutional and human rights (ECCHR) accuse le groupe d’avoir apporté un soutien financier et matériel à la Joint Task Force, une unité militaire mozambicaine qui aurait détenu, torturé et exécuté des civils entre juillet et septembre 2021, à l’entrée du site gazier.

La plainte a été déposée auprès du parquet national antiterroriste, compétent pour les crimes internationaux. Elle intervient alors que la major vient de lever la force majeure imposée après l’attaque djihadiste de Palma en 2021 et souhaite relancer les travaux de développement du site de liquéfaction de gaz naturel.

Selon l’ONG, la responsabilité de TotalEnergies découle du financement, de l’hébergement, de l’équipement et du versement de primes à ces soldats, malgré des informations internes signalant des violences commises par les forces armées dès 2020. La partie accusatrice affirme également que le géant de l’énergie était au courant des accusations de violations graves près de son site.

Les faits reprochés s’appuient notamment sur une enquête de Politico en 2024 et sur des rapports internes transmis aux financeurs, décrivant l’enfermement de 180 à 250 hommes dans des containers, où plusieurs seraient morts de suffocation, de torture ou d’exécutions sommaires. Seuls 26 survivants auraient été découverts après l’intervention des forces rwandaises.

TotalEnergies conteste ces allégations. L’entreprise soutient qu’elle ignorait ces faits, que son personnel avait quitté le site dès avril 2021 et qu’aucune information crédible ne lui avait été remontée concernant de tels abus. Le parquet doit désormais décider de l’ouverture d’une enquête formelle. Le gouvernement mozambicain a également ouvert une enquête, et plusieurs bailleurs publics, dont UK Export Finance et Atradius aux Pays-Bas, examinent les accusations dans le cadre de leurs engagements financiers.

Cette affaire fait suite à une plainte déposée en 2023 par des survivants de l’attaque de Palma, survenue entre mars et avril 2021, accusant la major de ne pas avoir protégé ses sous-traitants, dont certains ont été tués. En 2025, le procureur de Nanterre a ouvert une enquête préliminaire pour homicide involontaire et non-assistance à personne en danger.

Pour la société française, les enjeux sont importants. Sur le plan financier, le projet Mozambique LNG repose sur près de 15 milliards de dollars de prêts, dont certains ont été gelés. Les pressions s’intensifient également sur les banques et organismes publics ayant soutenu le projet, qui doivent évaluer le risque de complicité et la conformité sociale et sécuritaire du site.

L’avenir du projet pourrait dépendre de la décision du parquet français, des conclusions des enquêtes ouvertes au Mozambique et de la position des financeurs britannique et néerlandais. La major attend toujours que le gouvernement mozambicain couvre 4,5 milliards de dollars de coûts supplémentaires. Ces incertitudes pourraient affecter le calendrier de reprise du projet, prévu pour 2029, ainsi que sa crédibilité internationale.

Olivier de Souza

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