
L’arrivée de Chevron en Guinée-Bissau marque un tournant pour ce petit État côtier qui ne produit pas encore d’hydrocarbures et l’intègre à la dynamique d’exploration qui s’étend le long du bassin MSGBC, devenu l’un des pôles émergents d’Afrique de l’Ouest.
Chevron, deuxième compagnie pétrolière des États-Unis derrière ExxonMobil, a annoncé ce lundi 3 novembre son entrée en Guinée-Bissau à travers deux permis d’exploration offshore situés dans le bassin MSGBC, qui s’étend de la Mauritanie à la Guinée-Conakry. Selon la compagnie, sa filiale locale détiendra 90 % de participation dans les blocs 5B et 6B, le reste revenant à la société nationale Petroguin. L’opération a reçu les autorisations réglementaires requises.
Les deux permis, identifiés sous les noms Carapau et Peixe Espada, seront opérés par Chevron. Béatrice Bienvenu, Country Manager de Chevron pour l’Afrique de l’Ouest, a déclaré que l’entreprise se réjouissait de ce nouveau partenariat avec Petroguin et le gouvernement de Guinée-Bissau. D’après le communiqué publié par la compagnie, cette implantation s’inscrit dans sa stratégie mondiale d’exploration visant à enrichir son portefeuille global de concessions de haute qualité. Déjà producteur en Angola et au Nigeria, Chevron indique avoir augmenté son portefeuille d’exploration de près de 40 % ces deux dernières années, en prenant de nouvelles positions au Pérou, en Uruguay et en Namibie.
Cette implantation s’inscrit dans la continuité des initiatives récentes du groupe sur le continent. En Guinée équatoriale, Chevron a conclu en septembre un accord pour développer le gaz associé du champ Aseng, pour un investissement estimé à 690 millions de dollars. Au Nigeria, elle poursuit ses campagnes d’exploration pétrolière en eaux profondes, notamment dans les champs Agbami et Usan, tandis qu’en Namibie, elle détient 80 % d’intérêts sur les permis PEL 82 et PEL 90, situés respectivement dans les bassins de Walvis et d’Orange.
Pour la Guinée-Bissau, les enjeux sont également importants. Le pays ne produit pas encore d’hydrocarbures, mais multiplie depuis deux ans les initiatives pour attirer des partenaires étrangers dans l’exploration offshore. Avant l’accord avec Chevron, les autorités bissau-guinéennes avaient conclu en mai 2023 un accord de principe avec la compagnie italienne Eni pour évaluer le potentiel pétrolier et gazier du pays. Ce mémorandum portait sur l’étude de zones maritimes et sur des projets liés à la durabilité environnementale. En juillet 2023, en marge du sommet Russie-Afrique, le président Umaro Sissoco Embaló avait également exprimé le souhait d’une collaboration plus active avec la compagnie russe Lukoil. « Cette société effectue des travaux d’exploration offshore dans notre pays. Nous aimerions que le gouvernement russe encourage une participation plus active de cette société à la production de pétrole?», avait déclaré le dirigeant. Toutefois, les sanctions américaines ayant contraint Lukoil à annoncer, fin octobre, la cession de ses actifs internationaux, y compris en Afrique, les projets éventuels en Guinée-Bissau apparaissent désormais fortement compromis.
Pour l’heure, aucun calendrier opérationnel ni programme technique n’a été communiqué concernant les permis Carapau et Peixe Espada. Selon les données relayées en 2023 par Agence Ecofin, environ 498 millions de barils de ressources prospectives avaient été identifiés dans certains blocs côtiers bissau-guinéens par la société australienne Far Ltd, avant leur abandon en 2022.
Louis-Nino Kansoun
Lire aussi :
06/11/2024 - Chevron redéfinit sa stratégie de recherche de brut à travers l’Afrique
