
Le prix du nickel est en baisse continue depuis 2022 sur fond d’offre mondiale excédentaire et d’une demande encore limitée sur le marché des batteries. Malgré l’annonce de mesures visant à réduire la production, notamment en Indonésie, les analystes tablent sur un statu quo à court terme.
Alors qu’il s’attend déjà à un surplus de 209?000 tonnes en 2025, l’International Nickel Study Group (INSG) anticipe à nouveau un marché excédentaire du nickel pour 2026. Dans une note publiée le mardi 7 octobre, l’organisation basée à Lisbonne indique un excédent prévu de 261?000 tonnes l’année prochaine, dans un contexte où les prix du nickel restent sous pression en partie à cause de cette offre abondante. Malgré cette conjoncture, le développement de nouveaux projets se poursuit activement en Afrique.
Dans le détail, l’INSG projette une croissance de la production à 4,08 millions de tonnes en 2026, malgré les mesures de réduction de quotas d’extraction en Indonésie, premier producteur mondial de nickel. La même année, la consommation mondiale devrait, indique-t-elle, s’afficher à 3,8 millions de tonnes. De quoi générer un nouvel excédent, la quatrième année consécutive, depuis 2023, selon le document. Ces conclusions s’alignent avec celles faites la semaine dernière par le groupe minier japonais Sumitomo Metal Mining. Ce dernier, cité par Reuters, anticipe de son côté un excédent de 256 000 tonnes en 2026.
C’est dans ce contexte que First Quantum Minerals poursuit notamment en Zambie la montée en régime de sa mine Enterprise, entrée en production commerciale en juin 2024. La société y anticipe une production pouvant aller jusqu’à 25 000 tonnes en 2025. Dans le même temps, le canadien Ivanhoe Mines prépare d’ici fin 2025 la mise en service de son projet Platreef en Afrique du Sud, une future mine qui compte le nickel parmi ses principaux produits, en dehors notamment des métaux du groupe de platine (PGM).
De son côté, Lifezone Metals fait avancer en Tanzanie le projet Kabanga, un actif capable de produire annuellement 50 000 tonnes de nickel pendant 18 ans. Si la date de mise en production n’est pas encore connue, la société vise la décision finale d’investissement pour mi-2026, en vue du lancement de la construction. Des développements qui s’inscrivent globalement dans un contexte général de baisse du marché du nickel, alimentée par une offre en forte progression ces dernières années et une demande relativement modérée du secteur des batteries.
Dimanche 12 octobre, le métal se négociait à environ 15 200 USD la tonne sur la bourse des métaux de Londres, en baisse de 50 % par rapport aux 31 000 USD enregistrés fin 2022. Une tendance qui a déjà incité plusieurs opérateurs à suspendre leurs opérations de nickel, en l’occurrence BHP (Western Australia nickel).
Source : London Metal Exchange (LME)
Pour les projets africains cités cependant, les développeurs tablent sur une gestion prudente de leurs opérations. Dans son rapport du deuxième trimestre publié en juillet dernier, First Quantum Minerals évoque notamment une révision de sa stratégie minière pour l’année face à la « conjoncture économique difficile du marché du nickel ». Cette approche repose sur des ajustements opérationnels visant à « accroître le débit et réduire les coûts d’exploitation » de la mine.
De son côté, Lifezone Metals appuie principalement sa stratégie sur le potentiel minéral de Kabanga. « Nous sommes convaincus que le projet de nickel Kabanga est le meilleur projet de développement de nickel au monde. Sa teneur supérieure permettra une forte génération de trésorerie, même à des prix plus bas », commentait Ingo Hofmaier, directeur financier de la société américaine en avril dernier. Par ailleurs, il faut aussi noter que le nickel compte parmi les principaux métaux essentiels à la transition énergétique.
Si l’on assiste à une adoption croissante des batteries LFP (lithium-fer-phosphate), l’intérêt pour les batteries intégrant le nickel dans leurs chimies devrait rester important, selon les analystes. « La demande de batteries de véhicules électriques conventionnelles riches en nickel devrait augmenter à long terme, car la Chine restreint l’exportation de la technologie LFP », a par exemple déclaré le directeur général de Sumitomo, Shiro Imai, selon des propos relayés par Reuters.
Une prévision qui fait écho à celle formulée en juillet dernier par Will Talbot, analyste chez Benchmark Mineral Intelligence. « Si la part de marché du LFP (lithium-fer-phosphate) devrait augmenter, le NCM (lithium-nickel-manganèse-cobalt) restera important, en particulier sur les marchés occidentaux. », a-t-il déclaré dans un entretien avec Agence Ecofin. Reste à voir comment ces différents projets évolueront dans les prochains mois, entre les prévisions d’un nouvel excédent et ses implications sur les prix.
Aurel Sèdjro Houenou
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