
Plusieurs pays africains annoncent des projets d’hydrogène vert, à l’image de la Mauritanie qui a récemment signé un accord dans le domaine. Ces initiatives traduisent l’ambition du continent, mais l’Agence internationale de l’énergie estime improbable une production à grande échelle d’ici 2030.
L’Afrique figure parmi les régions les plus courtisées pour le développement de l’hydrogène vert, avec des projets qui pourraient transformer son paysage énergétique et la positionner comme acteur majeur des exportations mondiales. Le rapport « Global Hydrogen Review 2025 » publié le vendredi 12 septembre par l’Agence internationale de l’énergie (AIE) met néanmoins en évidence un décalage entre les ambitions et les réalités du terrain.
Selon l’AIE, l’Afrique, l’Amérique latine et l’Asie du Sud-Est pourraient si tous les projets se concrétisent, produire plus de 9 Mt/an d’hydrogène bas carbone d’ici 2030, soit un quart du total mondial annoncé. Mais à peine 0,5% d’entre eux disposent déjà d’investissements engagés, contre plus de 9% au niveau mondial. Ainsi, à peine 5% des projets annoncés dans les économies émergentes ont des chances d’être opérationnels à cette échéance, la grande majorité devant se concrétiser plus tard.
Parmi les obstacles expliquant ce faible rythme d’exécution, il y a la lente intégration des énergies renouvelables. En 2024, les trois régions réunies n’ont représenté que 6% des nouvelles capacités solaires et éoliennes installées dans le monde, un niveau jugé insuffisant pour soutenir une production électrolytique à grande échelle. Ensuite, la dépendance aux marchés extérieurs : près de 80% des projets annoncés dans ces régions sont destinés à l’exportation, soit presque deux fois la moyenne mondiale. Cela les rend dépendants d’une demande internationale encore limitée.
Le défi financier est tout aussi grand. Réaliser l’ensemble des projets annoncés nécessiterait 420 GW de capacité d’électrolyse et plus de 1500 milliards USD, soit l’équivalent des investissements mondiaux en nouvelles capacités de production électrique en 2024. Mais les trois régions ont attiré moins de 9% de ces investissements, avec un coût du capital pouvant atteindre 15%, contre 5 à 7% dans les économies avancées.
Ce constat conduit à une projection plus réaliste. L’Afrique, tout comme ses pairs cités, devrait surtout voir émerger quelques et projets pilotes et de démonstration plutôt qu’une véritable industrie d’ici 2030. L’enjeu sur les cinq prochaines années sera moins la course aux volumes exportés que la consolidation progressive d’une filière locale, capable de préparer le contenu à des projets à grande échelle.
Abdoullah Diop
Edité par : Feriol Bewa