
Après l’USAID, Washington met fin immédiatement aux projets du Millenium Challenge Corporation, avec une notification à venir pour les pays partenaires, d’ici 40 jours. En Afrique, seuls le Sénégal et la Côte d’Ivoire auront un délai pour achever les chantiers en cours.
Le président américain, Donald Trump, a décidé de mettre fin au Millennium Challenge Corporation (MCC), l’un des principaux instruments de l’aide américaine au développement. Encore non officialisée par la Maison Blanche, la décision a été confirmée par plusieurs sources proches du dossier. Le New York Times a révélé que c’est lors d’une réunion interne, tenue le mercredi 23 avril 2025, que les employés du MCC ont été informés de la fermeture prochaine de l’agence.
Selon une source interne, « tous les programmes en cours vont s’arrêter » et les gouvernements partenaires devraient être notifiés de manière formelle d’ici 40 jours. Cette décision découle d’une vaste réorganisation administrative lancée par la Commission pour l’efficacité gouvernementale (DOGE), nouvel organe mis en place par l’administration Trump et dirigé par Elon Musk. Un mémo interne évoque des suppressions massives de postes et une extinction progressive des missions du MCC.
Créée en 2004 par le président George W. Bush, le MCC s’était imposé comme un outil emblématique du soft power américain, misant sur des investissements structurants dans les pays à faibles revenus, en particulier en Afrique. Son approche conditionnelle — réserver les fonds aux Etats engagés sur la voie de la bonne gouvernance, de la transparence économique et de la démocratie — en faisait une alternative crédible à d’autres formes d’aide internationale plus souples sur les critères.
Depuis sa création, le MCC a investi près de 17 milliards de dollars dans des projets d’envergure : infrastructures routières, réseaux d’irrigation, électrification rurale. A l’heure actuelle, quatre pays bénéficieront d’une période de transition prolongée, dont deux africains : la Côte d’Ivoire, avec le projet de transport urbain d’Abidjan, et le Sénégal, à travers le « Power Compact » destiné à renforcer le secteur de l’énergie.
Un signal fort du désengagement américain en Afrique
Cette fermeture marque un nouveau jalon dans le retrait progressif des Etats-Unis de plusieurs initiatives de coopération internationale. Elle s’inscrit dans une tendance déjà amorcée plus tôt cette année, avec la suspension des activités de l’USAID, l’autre grand pilier de l’aide au développement américaine. Même si le MCC disposait d’un budget bien plus modeste — environ 1 milliard de dollars par an, soit 50 fois moins que l’USAID — sa portée symbolique et stratégique n’en était pas moins significative.
L'arrêt du MCC pourrait laisser un vide que d'autres puissances — à commencer par la Chine — seront promptes à combler. Pékin mène depuis des années une diplomatie économique offensive fondée sur des investissements massifs dans les infrastructures africaines, sans les conditionnalités politiques imposées par Washington.
La décision de l’administration Trump confirme ainsi une inflexion plus large de la politique étrangère américaine : celle d’un repli sur les intérêts immédiats des Etats-Unis, au détriment d’une stratégie d’influence plus globale, fondée sur le partenariat et la projection de valeurs. Pour les pays africains, ce retrait pourrait représenter un tournant stratégique, les forçant à diversifier encore davantage leurs partenaires et à revoir les termes de leurs relations avec les grandes puissances.
Moutiou Adjibi Nourou